L’établissement d’un système de plafonnement des émissions du secteur pétrolier et gazier marquerait un changement radical dans l’approche du Canada en matière d’action climatique en s’attaquant à la plus importante source de pollution par le carbone, qui est en croissance rapide. Un règlement visant à encadrer les émissions du secteur pétrolier et gazier prévoit soit l’élaboration d’un nouveau système de plafonnement et d’échange en vertu de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (1999), soit la modification des systèmes actuels de tarification de la pollution par le carbone en vertu de la Loi sur la tarification de la pollution causée par les gaz à effet de serre (LTPGES). L’adoption d’un tel règlement permettrait de réduire les émissions de gaz à effet de serre du secteur pétrolier et gazier afin que le Canada puisse atteindre ses cibles climatiques pour 2030 et 2050.
Comme le Règlement sur l’électricité propre, le projet de règlement sur le plafonnement des émissions du secteur pétrolier et gazier sera débattu, peaufiné et mis en œuvre au cours des prochains mois, et sera probablement adopté avant la fin de l’année 2023.
Pourquoi faut-il plafonner la pollution par le pétrole et le gaz?
En mars 2022, le gouvernement fédéral a défini un plafond d’émissions pour le secteur pétrolier et gazier dans son Plan de réduction des émissions. Au Canada, ce secteur est la plus grande source d’émissions de gaz à effet de serre, dont l’augmentation contribue aux changements climatiques. Nous attendons actuellement le premier projet de règlement sur le plafonnement, qui encadrera les émissions des sociétés pétrolières et gazières et aidera le Canada à atteindre son objectif de carboneutralité d’ici 2050.
La population canadienne appuie cette initiative historique, qui contribuera à atténuer les changements climatiques, à protéger la santé humaine et à préparer l’économie pour l’avenir. En effet, selon un récent sondage mené par Abacus Data, les Canadiens et Canadiennes estiment que le secteur pétrolier et gazier devrait être tenu de limiter ses émissions. La majorité des personnes ayant répondu au sondage (58 %) est d’avis que « le plafond d’émissions devrait garantir que l’industrie pétrolière et gazière contribue à la lutte mondiale contre les changements climatiques, comme tous les autres secteurs. »
Un plafond d’émissions pour le secteur pétrolier et gazier est important pour la santé humaine.
L’établissement d’un plafond d’émissions strict est une étape essentielle qui soutiendra la santé de la population canadienne. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), la crise climatique constitue « la plus grande menace sanitaire à laquelle l’humanité est confrontée ». En effet, les répercussions des changements climatiques se font sentir de plusieurs façons. Concrètement, de nombreuses personnes meurent ou deviennent malades en raison des canicules, des sécheresses, des inondations et de la perturbation des systèmes alimentaires. Ces phénomènes, qui sont associés aux changements climatiques, ont également une incidence sur les déterminants sociaux de la santé, tels que le soutien social, l’accès à l’emploi et l’accès aux soins de santé. Ces conséquences sont subies de manière disproportionnée par les groupes vulnérables et défavorisés.
En plus d’atténuer les changements climatiques, l’adoption d’un plafond d’émissions strict peut contribuer à diminuer d’autres sources de pollution qui menacent notre santé. Par exemple, le secteur pétrolier et gazier est le plus important émetteur de méthane au Canada. Le méthane exacerbe la crise climatique et aggrave la pollution atmosphérique mortelle, car il émet des toxines telles que de l’oxyde d’azote, des particules (PM2,5) et de l’ozone, dont la présence est associée aux problèmes suivants : asthme et autres maladies pulmonaires et cardiaques, accidents vasculaires cérébraux, démence, hospitalisations, naissances et décès prématurés.
La production et l’utilisation du pétrole et du gaz compromettent la santé de la population canadienne. Dans certaines provinces comme la Colombie-Britannique, le gaz naturel liquéfié (GNL) est en grande partie produit par fracturation hydraulique. Par ce procédé, les sociétés pétrolières laissent derrière elles des puits de fracturation toxiques, contaminent l’environnement et mettent en péril la vie des personnes vivant à proximité des lieux de forage.
En Alberta, des études ont révélé que les personnes se trouvant à proximité des usines d’exploitation et de valorisation des sables bitumineux sont exposées à des risques sanitaires élevés en raison de la présence de polluants dans l’air, l’eau et le sol, tels que les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), divers agents cancérigènes et le méthylmercure. De plus, l’extraction des sables bitumineux peut entraîner divers problèmes environnementaux liés à la chaîne d’approvisionnement, dont les suivants : pollution atmosphérique émise pendant le transport et le chargement, déversements de pétrole, déraillements de trains et explosions de wagons.
Quelle est la part équitable de l’industrie pétrolière et gazière dans la réduction des émissions?
En 2021, le Canada a mis à jour sa contribution déterminée au niveau national dans le cadre de l’Accord de Paris en établissant une cible de réduction de 40 à 45 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici 2030.
Entre 2005 et 2019, les émissions de gaz à effet de serre du secteur pétrolier et gazier ont augmenté de 19 %, alors que celles des autres secteurs ont diminué de près de 7 %. Le secteur de l’exploitation pétrolière et gazière, dont les émissions connaissent une croissance rapide, est la plus importante source de gaz à effet de serre à l’échelle de l’économie canadienne. Tout comme les autres secteurs, ce dernier devrait donc être tenu de contribuer à la lutte contre les changements climatiques.
Les député(e)s doivent rendre le plafond d’émissions pour le secteur pétrolier et gazier aussi strict que possible.
Comme toute modification réglementaire majeure, le plafond d’émissions pour le secteur pétrolier et gazier fera l’objet de pressions intenses : on essaiera d’en affaiblir les objectifs et de négocier des exemptions et des prolongations de délais en faveur de l’industrie, et d’y intégrer des échappatoires pour l’industrie. La communauté de l’ACME doit se mobiliser dès maintenant pour exiger l’adoption de mesures réglementaires rigoureuses qui s’attaquent à cette importante source de pollution par le carbone.
Parmi ses recommandations politiques plus détaillées, l’ACME demande à ce que le plafond d’émissions pour le secteur pétrolier et gazier :
- permette au Canada de réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 45 % par rapport aux niveaux de 2005 d’ici 2030;
Tout comme les autres secteurs de l’économie, l’industrie pétrolière et gazière devrait être tenue responsable de réduire ses émissions pour permettre au Canada d’atteindre ses objectifs climatiques.
- ait un échéancier fixe;
Le secteur pétrolier et gazier doit réduire ses émissions à l’horizon 2030, et non au-delà.
- ne permette pas d’échappatoire.
Le non-respect des objectifs de plafonnement des émissions doit avoir des conséquences. Tout projet de crédits compensatoires axé sur la nature doit être réalisé conformément à un marché de compensation réglementé. Le plafond doit s’appliquer à toutes les installations pétrolières et gazières au Canada, et ne pas permettre d’investissements supplémentaires dans le captage et le stockage du carbone.
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