Opinion – La méditation ne résoudra pas les problèmes d’environnement et de santé publique

En parcourant l’actualité, je suis tombée sur un article encourageant les soins personnels comme antidote à la pandémie. L’idée que la méditation soit la solution à ce problème de santé publique m’a immédiatement révoltée.

Divulgation : je suis sociologue. Dans le cadre de mon travail pour l’Association canadienne des médecins pour l’environnement (ACME), une organisation de santé environnementale dirigée par des médecins et d’autres professionnels de la santé. J’examine la santé dans le contexte de forces sociales, politiques, institutionnelles et économiques plus larges. En d’autres termes, j’utilise une lentille de santé publique – l’expression « santé publique » ayant été inventée au début du XIXe siècle pour distinguer les actions que les gouvernements et les sociétés, par opposition aux individus, devraient prendre pour protéger la santé des gens.

Le problème des conseils d’autogestion de la santé est qu’ils présentent les actions individuelles comme étant capables de déterminer les résultats en matière de santé ou que les choix comportementaux sont suffisants pour surmonter les influences systémiques et structurelles. La réalité est que je ne peux pas, tout simplement, tracer une ligne droite entre mes comportements et l’état de ma santé. La législation, la réglementation, la politique et les facteurs sociaux influencent les résultats en matière de santé.

Nos réalités actuelles renforcent le fait que l’action individuelle ne suffit pas. Nous sommes au milieu d’une pandémie pluriannuelle. Nous sommes également au cœur de la crise climatique. Enfin, les conditions environnementales dans lesquelles les expositions toxiques sont présentes constituent un problème permanent d’écologie et de santé humaine. Ces phénomènes suscitent l’inquiétude, l’énergie et l’action des gouvernements. Les gouvernements savent que des interventions systémiques sont nécessaires pour la santé individuelle et publique, malgré les messages de responsabilité personnelle très répandus. Mais ce que les gouvernements font actuellement n’est pas suffisant.

Nous avons besoin d’interventions de santé publique fondées sur des preuves pour lutter contre les infections continues par le COVID-19 (et les impacts connexes). Nous avons besoin de stratégies solides pour une reprise juste après la pandémie tout en s’attaquant à la crise climatique. Et nous avons besoin, de toute urgence, d’une réforme solide de la Loi canadienne sur la protection de l’environnement (LCPE), dont la dernière mise à jour remonte à 1999.

Imaginez-vous en 1999. Quel âge aviez-vous? Que faisiez-vous? En quoi le monde est-il différent d’alors? Réfléchissez à la façon dont les conditions environnementales, les expositions et les polluants ont changé au cours de cette période. L’effet de réchauffement global sur la température de la planète est dû aux émissions de gaz à effet de serre (GES) provenant de la combustion de combustibles fossiles et de processus industriels, qui ont augmenté depuis la dernière mise à jour de la LCPE. Selon certaines estimations, plus de 100 000 substances et produits chimiques sont aujourd’hui commercialisés, dont certains n’ont été introduits que récemment.

Suite à une étude publiée récemment, les auteurs concluent que la pollution chimique a franchi une « limite de santé planétaire » – les limites de la nature pour soutenir l’activité humaine – et soutiennent qu’une réglementation plus stricte et un plafonnement de la production et d’émission des produits chimiques sont nécessaires, tout comme les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Dans le cadre du Plan de gestion des produits chimiques du Canada et de la LCPE, les substances sont soumises à un processus d’évaluation et de gestion des risques. Mais il existe des substances et des connaissances actualisées sur les risques qui ne sont pas encore prises en compte dans la mise à jour tardive de la LCPE.

Cela fait maintenant plus de vingt ans que le Parlement a adopté la LCPE, et cette loi fondamentale de prévention de la pollution doit être réformée pour faire face aux menaces actuelles sur la santé environnementale. Ni la méditation, ni une longue marche, ni la réduction des facteurs de stress personnels ne résoudront les problèmes complexes de santé environnementale auxquels nous sommes confrontés.

Ces activités peuvent être des mécanismes d’adaptation appropriés pour la santé mentale des individus, avec des avantages sur leur santé physique, mais elles ne sont pas les solutions dont nous avons besoin pour faire face aux nombreuses menaces interconnectées qui pèsent sur notre santé et notre bien-être aujourd’hui et à l’avenir.

Nous avons besoin d’une volonté politique et d’une action gouvernementale. Les principaux groupes environnementaux et de santé du Canada demandent à tous les partis fédéraux de donner la priorité à la modernisation de la LCPE au cours de cette session parlementaire et d’adopter un projet de loi renforcé avant la fin de 2022. Comme l’a reconnu un politicien lors d’une récente réunion, nous avons besoin que les politiciens cessent de se battre entre eux et commencent à se battre pour la santé environnementale.

La réforme de la LCPE est un besoin essentiel pour une reprise juste et verte. Le projet de loi S-5 déposé au Sénat le 9 février 2022 comporte des améliorations indispensables. Cependant, le projet de loi doit être renforcé davantage pour offrir une loi de protection de l’environnement plus forte qui reflète nos conditions et nos connaissances actuelles. Le Comité permanent de l’environnement et du développement durable de la Chambre des communes devrait commencer dès maintenant à examiner ce projet de loi, pendant même les débats au Sénat et leur vote sur cette législation, afin de garantir qu’une LCPE forte devienne une loi dès que possible.

Pour la santé actuelle et future des personnes vivant et travaillant au Canada, nous devons reconnaître de manière significative le droit humain à un environnement sain. Les Nations Unies ont récemment déclaré que l’accès à un environnement sain est un droit de la personne, lançant ainsi un appel à l’action pour que toutes les nations prennent des mesures audacieuses. Il est important de noter que ce droit n’est pas incommensurable avec l’amélioration économique.

Pour la santé actuelle et future des personnes qui vivent et travaillent au Canada, nous avons besoin d’un projet de loi qui élimine les échappatoires concernant les substances toxiques préoccupantes et qui exige leur interdiction, tout en tenant compte des effets cumulatifs des substances chimiques, avec des délais clairs pour les évaluations et la mise en œuvre de la gestion des substances chimiques.

Pour la santé actuelle et future des personnes qui vivent et travaillent au Canada, nous avons besoin d’une loi qui élimine les obstacles qui empêchent les citoyens de faire part de leurs préoccupations concernant les expositions toxiques et qui prévoit et protège notre droit de connaître les substances toxiques auxquelles nous sommes exposés.

Les réalités actuelles de la santé environnementale doivent être reflétées dans la législation afin qu’elle soit protectrice et préventive. Nous devons penser à long terme. Le rétablissement de COVID-19, l’adaptation au changement climatique et l’atténuation de ses effets, ainsi que la réforme de la LCPE exigent une action immédiate pour l’avenir de la santé publique et de la justice environnementale.

Nous avons besoin de la coopération et de la collaboration de tous les partis fédéraux pour adopter un projet de loi renforcé dans l’année afin de faire entrer la LCPE dans le 21e siècle.

Méditez là-dessus.

Photo par Oluremi Adebayo/Pexels

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