Une réforme de la LCPE pour la prévention du cancer du sein

Par : Jane McArthur, directrice du programme sur les substances toxiques

C’est le mois de la sensibilisation au cancer du sein. Vous êtes sans doute bien au courant de la maladie et, malheureusement, vous connaissez probablement de nombreuses personnes qui en sont touchées. Mais saviez-vous qu’en ce moment même, nous avons la possibilité de modifier la réglementation canadienne de manière à prévenir de futurs cancers du sein ? La Loi canadienne sur la protection de l’environnement (LCPE) de 1999 est en train d’être mise à jour au Parlement, ce qui aurait dû être fait depuis longtemps. En juin, le projet de loi S-5 a été adopté avec amendements par le Sénat. Une amélioration du projet de loi par la Chambre des communes est toujours nécessaire cet automne.

Une réforme visant les domaines clés du projet de loi S-5 renforcera les protections, améliorera le contrôle des expositions et conduira à la prévention de la pollution. Au Canada, cela pourrait transformer la vie des personnes à risque de développer un cancer du sein et se traduire par une diminution du nombre de futurs diagnostics.

Bien que le projet de loi S-5 représente un pas en avant en introduisant le droit à un environnement sain pour la première fois dans la législation fédérale, ce nouveau droit doit être renforcé afin d’inclure les mesures que les ministres prendront lorsque les normes de qualité de l’air ambiant seront dépassées. Cela changerait les choses pour Maria et ses voisins qui vivent et travaillent à l’ombre du pont Ambassador, très fréquenté, et qui sont entourés de pollution atmosphérique industrielle. Le diagnostic de cancer du sein de Maria l’a amenée à rechercher une « politique susceptible d’avoir un impact sur l’atténuation d’une partie de ce risque lié à la pollution atmosphérique ».

Il est nécessaire d’avoir une structure permettant de prendre en compte le droit à un environnement sain lors de l’évaluation des substances toxiques. Clover, jeune militante, s’inquiète de l’exposition continue aux substances toxiques et suggère aux décideurs politiques « d’écouter les communautés autochtones qui savent déjà ce qu’il faut faire. Les solutions existent, elles sont solides et prêtes à être mises en pratique. »

La mère de Samantha est morte d’un cancer du sein et elle vit et travaille au milieu de polluants liés à la maladie. L’observation selon laquelle « les besoins commerciaux… finissent par être plus importants pour les décideurs que la protection d’une femme individuelle contre le risque de cancer du sein » illustre pourquoi le droit à un environnement sain devrait inclure des facteurs sociaux, sanitaires, scientifiques et économiques dans son application, et non devenir des justifications pour limiter la manière dont le droit est appliqué. Clarifier ces facteurs pertinents lors de l’interprétation du droit est un mécanisme de prévention du cancer du sein.

Les principes de justice environnementale et d’équité intergénérationnelle devraient s’appliquer à l’ensemble de la loi. Cela pourrait modifier les impacts pour les femmes comme Josephine, qui fait partie du groupe des femmes noires, latines et asiatiques ciblées par les fabricants de produits toxiques. Les populations LGBTQIA+ et non-conformes dans le genre luttent également contre l’injustice toxique de la beauté qui les expose à un risque plus élevé de cancer du sein. Une équité environnementale reconnaîtrait que tout le monde n’est pas toxicologue et capable d’effectuer une évaluation des risques.

Les modifications visant à moderniser la réglementation canadienne en matière de gestion des produits chimiques devraient inclure le droit de connaître les ingrédients des produits pour les personnes comme Tracy, qui s’inquiète du fait que les femmes atteintes d’un cancer du sein suivent un traitement « et qu’elles sont toutes dans l’ignorance totale de ce qui pourrait leur nuire ».

La mise à jour des évaluations de produits chimiques et des plans de gestion des risques pourra permettre de s’attaquer au problème souligné par Jacqueline, médecin; elle illustre la nécessité d’intégrer de nouvelles preuves, notamment sur les perturbateurs endocriniens présents dans les plastiques et d’autres produits, qui « peuvent affecter le système reproductif, en imitant les hormones naturelles présentes dans notre organisme, et prédisposer les femmes à des anomalies du tissu mammaire et peuvent provoquer des cancers ».

Les demandes publiques d’évaluation ou de réévaluation d’un produit chimique ou d’une catégorie de produits chimiques rendront hommage à Grant, qui fait partie des hommes (souvent oubliés) ayant développé un cancer du sein. Toutes les victimes de la maladie ainsi que leurs expériences et les risques qu’elles encourent doivent être entendus. Des réponses claires aux demandes du public peuvent faire partie de cette réponse.

Sophia, une femme très exposée ayant reçu deux fois un diagnostic de cancer du sein, alors qu’elle ne présentait pas de facteurs de risque traditionnels, sait que le retard est mortel. « Je souhaite des changements maintenant, car ces personnes n’ont pas vingt ou quarante ans pour attendre ». La responsabilisation aux échéances des évaluations de produits chimiques est un moyen de s’assurer que les impacts réels sur les personnes réelles soient traités plus tôt.

Des produits chimiques toxiques liés au risque de cancer du sein se trouvent dans des articles que les femmes manipulent tous les jours, tels que les bisphénols dans le papier thermique utilisé pour les reçus. Le substitut du BPA, le BPS, peut augmenter l’agressivité du cancer du sein, un risque pour les centaines de milliers de caissières et autres femmes qui les manipulent. Une substitution davantage sécuritaire des produits chimiques toxiques doit également faire partie d’une LCPE actualisée.

Élargir l’accès du public aux données par une gestion plus stricte de l’utilisation de l’exception relative aux renseignements commerciaux confidentiels (RCC) en vertu de la Loi améliorera la confiance et la responsabilisation d’Erica, préoccupée par les expositions d’elle-même et de sa fille, ainsi que par leur risque de cancer du sein, et qui critique le manque de transparence à propos des substances sur le marché. Elle avoue : « Je ne pense pas faire confiance à quelque chose sans savoir comment et de quoi c’est fait. »

Malgré les messages omniprésents et des années de sensibilisation, non seulement un grand nombre d’entre nous ne savent toujours pas quelles sont les causes environnementales du cancer du sein, mais les lois et les politiques canadiennes n’en font pas assez pour protéger les femmes contre les expositions pouvant mener à un diagnostic. En ce Mois de la sensibilisation au cancer du sein, sensibilisons-nous à nos connexions avec l’environnement et agissons en faveur de la prévention primaire. La modernisation de la LCPE par le biais d’un projet de loi S-5 renforcé est un pas dans la bonne direction !

Pour en savoir plus sur la campagne de réforme de la LCPE de l’ACME, visitez notre page de campagne ou contactez Jane McArthur, directrice du programme des substances toxiques à jane@cape.ca.

Lire l’article « Stop running from the problem : prevent breast cancer by reducing toxic chemicals » publié dans le Toronto Star

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